C'était une maison douce
|
Une maison de bon aloi
|
Juste ce qu’il faut de mousse
|
Répartie aux bons endroits
|
Assez de murs pour connaître
|
Une chaleur bien à soi
|
Et ce qu’il faut de fenêtres
|
Pour regarder sans effroi
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
Elle ouvrait parfois sa porte
|
À ceux qu’elle choisissait
|
La serrure n’est pas forte
|
Maison, tu n’as pas de clé
|
Mais avec sa confiance
|
Jamais elle ne pensa
|
Qu’on pût user de violence
|
Pour pénétrer sous son toit
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
Advint qu’un jour de malchance
|
Une bande s’approcha
|
On sonne à la porte, on lance
|
Des coups de pieds ça et là
|
À plusieurs, on s’encourage
|
On prétend qu’elle ouvrira
|
Et commence le saccage
|
La porte on l’enfoncera
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
Sauvagement ils pénètrent
|
Dévastant tout devant eux
|
Ils obligent les fenêtres
|
À s’ouvrir devant le feu
|
Avec leurs couteaux ils gravent
|
Des insultes sur les murs
|
Et s’en vont faisant les braves
|
Quand tout n’est plus que blessure
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
La maison, depuis ce crime
|
N’a plus d'âme ni de nom
|
Mais elle n’est pas victime
|
«C'est de sa faute», dit-on
|
Il paraît qu’elle a fait preuve
|
D’un peu de coquetterie
|
Avec sa toiture neuve
|
Et son jardin bien fleuri
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
D’ailleurs, une maison sage
|
Ne reste pas isolée
|
Celles qui sont au village
|
Se font toujours respecter
|
Quand on n’a pas de serrure
|
Il faut avoir un gardien
|
C’est chercher les aventures
|
Que de fleurir son jardin
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
Si vous passez par la route
|
Et si vous avez du cœur
|
Vous en pleurerez sans doute
|
C’est l’image du malheur
|
Mais rien, pas même vos larmes
|
Ne lui portera secours
|
Elle est loin de ses alarmes
|
Elle est fermée pour toujours
|
Non, non, je n’invente pas
|
Mais je raconte tout droit
|
Si j’ai raconté l’histoire
|
De la maison violentée
|
C’est pas pour qu’on puisse croire
|
Qu’il suffit de s’indigner
|
Il faut que cela s’arrête !
|
On doit pouvoir vivre en paix
|
Même en ouvrant sa fenêtre
|
Même en n’ayant pas de clé
|
Non, non, je n’invente pas
|
Moi, je dis ce que je dois |