| Je revois encore Dan m’expliquer sa théorie
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| En s’agrippant fermement l’entrejambe
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| Il me disait comme ça, avec cet accent que je t'épargne:
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| «Il faut distinguer le Cock Music et le Smart Music tu vois
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| Rolling Stones, Pixies, AC/DC, Guns’n’Roses, et cætera, et cætera…
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| C’est une question de génération mon p’tit gars ! |
| "
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| Ok, il a peut-être raison, je ne sais pas
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| Il y a quelque chose d’ironique dans tout ça
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| Comme si une fois, le Big Magnet s'était dit:
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| «Tiens Pierrot amène-toi, amène-toi qu’on rigole !
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| Tiens, tu le vois l’autre taré en bas?
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| Eh bien moi j’ai décidé que pour les cent prochaines années
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| Il avancera les yeux bandés. |
| «Et Pierre de répliquer:
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| «Seigneur, soyez pas pute
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| Laissez-lui au moins un des indices par-ci par-là, j’en sais rien «Et il en fût ainsi
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| Depuis. |
| Depuis…
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| Jour et nuit, je traque les épiphanies,
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| Avec la rage d’un mercenaire sous crack
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| D’un alcoolique en manque de Jack,
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| D’un dément, d’un amant qu’on plaque
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| Jour et nuit, je traque les épiphanies
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| Avec la rage d’un mercenaire sous crack
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| D’un alcoolique en manque de Jack
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| D’un amant qu’on plaque
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| D’un dément qu’on claque
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| Je revois encore Matthieu
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| Et les étoiles dans ses yeux
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| Entre deux cigarettes
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| Fumées à la fenêtre de ma chambre
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| Il me disait comme ça:
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| «Mon vieux, tu savais que le verbe cristallisait la pensée?
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| Je te jure, un mot sur une idée foireuse
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| C’est exactement comme un baiser
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| T’as pas remarqué? |
| «C'est une question de perception
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| Et au fond, je sais qu’il a raison
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| Il y a quelque chose de mystique dans son affaire
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| Pouvoir ramasser les mots par terre
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| Et les jeter comme des pierres
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| Contre les parois plongées dans le noir
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| Pour en faire sortir les choses qui blessent
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| Grâce à la parole, réussir à s’armer
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| Contre les sales pensées, et faire des plans
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| Serrer les poings, serrer les dents
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| Les cogner, leur rentrer dedans
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| Essayer d’attraper les syllabes à la volée
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| Pour en faire des bougies qui éclairent
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| Et qu’on placera sous les paupières;
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| Ou des jolis bouquets
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| Pour une fille qui nous plaît
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| Finalement c’est pour ça que j'écris
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| Je revois encore Thibault éclairé par le halo
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| De la lampe à pétrole
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| Il me disait comme ça
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| Entre les vapeurs d’alcool:
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| «Tu sais qu’on peut flotter au-dessus du sol
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| Rien qu’avec la parole?
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| Je te jure ! |
| On faisait ça quand j'étais enfant
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| Sur le terrain vague derrière chez mes parents «C'est juste une question de conviction
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| Et je prie pour qu’il ait raison
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| Il y a quelque chose de magnifique dans son histoire
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| De savoir que si tout foire
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| Il nous en reste dans les tiroirs
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| Grâce à eux, eux qui ont reçu le feu sacré
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| Qui permet de tout voir
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| Eux, les machines à observer
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| Les machines à mettre des mots sur tout
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| Eux, qui écrivent plus vite que la pensée
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| Et avec ça, ils agrandissent la vie
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| Ils font apparaître les fils
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| Qui relient toutes les choses entre elles
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| Et ça leur donne le courage de tout affronter
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| Même la Kolyma.
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| En attendant moi…
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| En attendant moi quoi?
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| Moi j’ai rien vu, rien lu
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| Rien entendu et surtout rien compris
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| Mais ce n’est pas grave, je t’attends, tant pis
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| La parole comme vaccin contre la mort
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| La parole comme rempart contre l’ennui
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| Parler, parler, parler encore
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| Parler pour affronter la nuit
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| La parole comme vaccin contre la mort
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| La parole comme rempart contre l’ennui
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| Parler, parler, parler encore
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| Parler pour affronter la nuit |