| J’suis né au bled au Zaïre l’Afrique ma béquille |
| Nourri au blues de Biggie, mon nom c’est Youss' Mabiki |
| Frère je viens de loin, bon élève, gentil mec |
| Té-ma la grosse paire de lèvres |
| Je suis noir, fier de l'être |
| Venu en France à neuf piges, une ardoise dans mon keuss' |
| '88 me voilà, j’ai le Val-d'Oise dans mon cœur |
| Glacé par le froid, allergique à l’air libre |
| Je roule ma bosse à Cergy, petit appart' au RJ |
| Les flics, non merci, j’imagine mon Bercy |
| De percer, parce que Solaar et Nique Ta Mère m’ont bercé |
| Je suis brave et battant, fuck les drames qui m’attendent |
| Le sourire bright éclatant devant les bras de ma tante |
| Inséparable de mes zincs du Neuf-Cinq |
| Au tier-quar les guns claquent |
| C’est ça la vie d’un jeune black |
| Les nouvelles sont mauvaises |
| C’est sur un simple coup d’fil que j’ai dû perdre le goût d’vivre |
| Parce que ma mère est partie pour un môme de dix piges |
| C’est tragique j’comprends mieux pourquoi mon cœur est fragile |
| Alors je plonge dans mes livres, attentif au tableau |
| Les études, la cantine, faut qu’j’donne des thunes à tantine |
| C'était l'époque beat box devant les halls |
| Tip-top était l'école, hip-hop étaient les codes |
| Chintok était le mode, frère les premiers sons c’est pas de la disco |
| Moi je rappe ma vie, mes ennuis fiscaux |
| Chez moi c’est maladif, les mots me blessent, le son me canalise |
| Frère l’inspiration me vient sans cannabis |
| La rue me paralyse, ici ça pue la pisse |
| Man je suis ghetto, je serre la pince j'évite de faire la bise |
| Les épreuves m’ont tiré vers le bas, 14 ans quand les huissiers m’ont viré |
| J’ai beau dire que je vais bien, que j’en ai rien a ciré |
| J’suis touché, la vérité c’est qu’j’arrête pas d’me moucher |
| Parce que de coups nos vies sont rythmées, bientôt c’est l’An 2000, man |
| Les gardes à vue sont filmées, les flics me traitent de pygmée |
| Rapide est mon ascension, le bac avec la mention |
| La street est dans mes hormones, l’Afrique devant la Sorbonne |
| Que des journées de douze heures, archétype |
| Du branleur comme un loser j’fais du télé markéting |
| Bachelier mais chômeur je fuck le monde du travail |
| J’suis dans la merde à plein temps, du haut de mes 24 printemps |
| En 2005 j’me lance, j'écris des rimes avec mon beau stylo |
| J’bosse dans le studio avec mon soce Philo |
| En 2007 je craque, premier album solo |
| Mode Motherfuck si c’est pas lui ça sera son pote Naulleau |
| Quand le travail finit par payer |
| Depuis je fais du profit, je remplis à la Koffi |
| En vie tant que possible, fuck la langue de Shakespeare |
| S-Pi me back, moi je rap tant que je respire |
| En route était mon histoire, les mecs qui viennent de chez moi |
| Ne marchent que pour avancer, espoir du peura français |
| En 2009 tout change, mon fils Malik me mène en bateau |
| C’est plus Papa Wemba mais papa gâteau |
| Du coup la vie s'éclaircit, dis-le à personne, mais perso |
| Moi j’suis comme un fou devant son berceau |
| Mon père je pars au casse-pipe, mais n’oublie pas je suis avant tout |
| Youssoupha, Lyriciste Bantou |
| Le Monde m’a condamné pour rien, alors comment lui dire? |
| Allez fuck Amélie Poulain, moi j’n’ai que le crapuleux destin de Thomas Idir |
| Vous dire qu’le métissage renforce ou fragilise |
| Pur Parisien enfant j’relie la France avec la Kabylie |
| Même si mon enfance me déstabilise |
| Mon père subit l’offense, taffe à la souffrance mais jamais ne rentabilise |
| Mise à la rue, parents anéantis et trop piégés |
| Et il m’est apparu qu’ils m’ont menti pour mieux me protéger |
| Trop légers sont les flashbacks de cette époque |
| Blacks blacks étaient mes potes, barbare était l’escorte |
| Dare dare j’me téléporte, mon innocence est intacte |
| Les Ulis m’ouvrent leurs portes, 1984 |
| C’est «rue des Bergères» et la jungle, fait de mégères et de dingues |
| Pas que de misère et de flingues, même si c’est l’hiver et je trinque |
| Noyé dans un océan de tours encore très jeune et sage |
| La tête qui tourne quand je me retrouve au 13ème étage |
| Derrière les cages d’escalier, la douleur de nos blocs |
| Mes voisins de palier ont les couleurs des quatre coins du globe |
| On est tous pote, à une famille on s’apparente |
| À défendre le même code 91 940 |
| Mais j’ai des carences au collège, transparent et en colère |
| Et puis tous ce carcan scolaire, aucun d’mes parents n’le tolère |
| Jamais, j’aimais la rue alors la rue m’a fait la bise |
| La débrouillardise et la ruse avec Will Scala et Bigs |
| Oui oui voilà le biz, oui oui voilà le Brinks, nan |
| Jeune délinquant y’a pas de quoi casser des briques, nan |
| Quelques vol, quelques trafics affolent les graphiques |
| Les sales flics de l’Arkansas patrouillent à Los Monzas |
| Qui a donné mon blaze? Scred dans mes esquives |
| Je regardais DBZ quand a débarqué la perquis' |
| Mon père crise devant son bad boy qui va trop vite |
| Quand il me gifle je sais qu’il a été un cow-boy dans une autre vie |
| Ces poches se vident, au chômage pas une chance |
| Ni dommages ni indulgence, on déménage dans l’urgence |
| Ma gueule, on s’débrouille seul, avec mon père comme des brutes |
| Que les amis qu’on a aidés aillent se faire enculer par Belzébuth |
| J’traîne ma réput' loin du quartier de mon cœur |
| On emménage dans un taudis, je suis maudit et j’en ai des rancœurs |
| Mon grand cœur je l’ai gerbé |
| J’mets tout dans le verbe et je tourne, rappe mes doutes du RER B |
| Des rêves de foot mais ma vie est un grand désordre |
| 18 piges à traîner, c’est mort pour s’entraîner au Camp des Loges |
| En avançant, j’rêve d'être numéro 10 |
| Mais me voilà avant-centre dans la cour de Fleury-Mérogis |
| Mon registre carcéral n’en est qu'à ses débuts |
| Mais heureusement que j’ai le rap, les rimes que je débusque |
| Et je débute, peu de cash car on était pas pétés d’maille |
| Assassin des clashs bien avant 8 Miles |
| J’suis à des miles d’un rap game hostile |
| Moi je n’ai guère ton style, te fais la guerre à dégaine ton style |
| J’me fais rare mais j’ai mes plans mec |
| Et c’est pas grave si la moitié du rap me prend juste pour un blanc-bec |
| Le problème: la prison me fait trop mal |
| Le label qui m’aidera à me faire la belle s’appellera Six-O-Nine |
| J’me fixe au mic, un diamant à mes côtés |
| Boycotté j’mets à l’amende, mon testament du bon côté |
| J’ai récolté de quoi rendre ma vie plus stable |
| Mais trop d’amitiés ont sauté quelques gros albums plus tard |
| Ma plus belle gloire ce ne sont pas mes disques d’or |
| Mais toute ma vie sur le visage de ma fille quand je la vois qui dort |
| Et je lui donne tout mon amour depuis |
| Le sommeil nous épuise, je serai le soleil de ses jours de pluie |
| Car j’suis le même sous mon K-Way |
| Ma vie est délicate, S.I.N.I.K., babababah, bah ouais ! |